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Etant donné ce que nous voyons – Etant donné ce qui me regarde  ///


Qu’il s’agisse de peinture, de sculpture, d’installation vidéo, de photographie, de livre d’artiste ou de performance, l’art actuel est intrinsèquement attaché à l’histoire du modernisme, marqueur s’il en est, de la remise en cause du statut d’œuvre d’art. Interroger le réel revient à expérimenter le virtuel à l’heure où les nouveaux médias permettent la confusion et où la mise en scène exacerbe le doute. L’information est plurielle, omniprésente et court aussi vite sur la toile avide d’overdose visuelle que sa consommation en est immédiatement satisfaite. Nous laisserons donc aux médias le soin de se charger de son relais.

Ce qui anime ici, c’est « l’image comme critique et la critique comme travail de l’image ». Idée développée par le philosophe et historien Georges Didi-Huberman dans son ouvrage « Ce que nous voyons, ce qui nous regarde ». Il s’agira plutôt de développer une vision subjective au sujet d’expositions, de plasticiens, de photographes, et parfois même d’ouvrages, selon un exercice critique stricto sensu. Le choix des sujets traités est délibérément celui d’une volonté féroce de proposer une autre voie et non d’élaborer un condensé de contenus qui ne saurait servir ni le propos, ni les enjeux de la scène artistique actuelle. Arbitraire, celui-ci suivra néanmoins une certaine actualité.

Si la critique disparaît peu à peu au profit d’une globalisation des discours, l’image finit paradoxalement par se confondre. La même image est inlassablement dupliquée d’un média à l’autre si bien qu’elle vint à disparaître dans le céans de nos mémoires subliminales. C’est pourquoi nous tenons à livrer notre vision propre des médiums « exposition » et « livre ». Si l’on considère le livre à la fois comme œuvre et support, alors l’espace délimité qu’il constitue ou non permet cette découpe du réel.

Car regarder, c’est repenser le rapport à l’évidence. A bien y voir, c’est également rejouer les conditions de l’expérience du visible en regard de la croyance que l’on confie à l’objet. En ce sens, nous rejoignons l’idée de Harald Szeemann selon laquelle « tout comme on n’a jamais, dans aucune œuvre d’art, un niveau unique de réalité, mais un niveau dépendant de l’observateur et de la manière d’observer, qui ne fait que dominer l’autre », nous réinterrogeons alors notre position.

Le titre fait également référence au grand « détracteur » de l’histoire de l’art Marcel Duchamp. « Etant donné » se réfère à sa célèbre installation : Etant donnés : 1°) La Chute d’eau, 2°) Le gaz d’éclairage, et renvoie simultanément l’observateur à ses trois fonctions de regardeur, d’acteur et de voyeur. Au moment où les langages se multiplient à mesure que nous touchons du bout des doigts de nouveaux lexiques, curieusement le discours se perd, se délie. Force est de proposer une alternative, un autre ton. Dans une volonté encore et toujours de montrer à voir l’étendue de ce champ inépuisable que l’art rend visible, intelligible et vivant.


Fanny Lambert, mars 2012